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Une réforme menée à marche forcée

Mots-clés : Subvention, Aides à l'emploi, APE

C'est à marche forcée que le Gouvernement wallon, et singulièrement son ministre de l'Emploi Pierre-Yves Jeholet, continue à avancer dans la réforme visant l'abrogation du dispositif APE en vue de son transfert aux ministres de tutelle. L'image est un peu elle d'un train fou fonçant dans un tunnel dont on ne voit pas l'issue.

De nombreux éléments doivent être appréhendés simultanément pour avoir une vision claire de ce que deviendra l'APE.

1. Le projet de Décret abrogeant l'APE au 31-12-2020 et créant une période transitoire du 1-01-2020 au 31-12-2020

Après de nombreux palabres, la Commission de l'Emploi a fini par accepter d'auditionner l'UNIPSO, la plateforme APE, les pouvoirs locaux et les organisations syndicales interprofessionnelles. Cette audition s'est tenue le 31-01-2019 et vous trouverez le texte et la présentation sous ce lien.

Le texte devrait être voté en Commission de l'emploi le 26-02 puis soumis en plénière le 15-03.

L'opposition ECOLO-PS a déposé une série d'amendements qui nous intéressent, notamment :

• La suppression du plafonnement de la valeur du point

• La prise en compte complète des emplois créés après 2016

• Le maintien des crédits d'ancienneté

• La garantie du maintien des subventions actuelles jusqu'au 31-12-2023

• Le report de la période transitoire au 1-01-2022

Il y a sans doute peu de chances que le projet de Décret soit amendé, mais laissons faire le travail parlementaire.

L'UNIPSO a insisté, au cours de son audition, sur plusieurs de ces points importants avec quelques nuances.

La question de la neutralité budgétaire (suppression du plafonnement et meilleure indexation) a été mise en avant.

2. Le projet d'Arrêté couvrant la période transitoire du 1-01 au 31-12-2020

Le Gouvernement a examiné en première lecture (il y en aura au moins encore une) un projet d'arrêté visant à couvrir la période transitoire (2020). Y seront fixés :

• Le coefficient pour passer d'une valeur de subvention 2015-2016 à une valeur 2020. Le Gouvernement annonce un pourcentage de 4,32% alors que tous les opérateurs estiment à ±10% la valeur nécessaire pour couvrir indexations et coût lié à l'ancienneté. La valeur sera fixée définitivement lors de la deuxième lecture.

• La clé de plafonnement que le Gouvernement estime toujours à 50% quand les interlocuteurs sociaux demandent sa suppression pure et simple.

• La durée de la période transitoire dont tous demandent la prolongation d'une année pour permettre des concertations suffisantes avec les nouveaux gouvernements sur l'intégration dans les politiques fonctionnelles.

• La possibilité pour les pouvoirs locaux de demander la récupération de points cédés à des associations au plus tard le 30-0-2019.

3. La proposition de Décret encadrant l'accord de coopération à trouver avec la Communauté française pour le financement des postes 

Plusieurs rencontres se sont tenues entre les cabinets des ministres-présidents de la Communauté française et de la Région wallonne sans aboutir à un accord de coopération. En effet, le ministre-président Demotte refuse de s'engager estimant ne pas disposer de toutes les données. 

On peut le comprendre quand on sait qu'il lui a été remis un cadastre des projets que la Wallonie a placés dans ses compétences ans lui remettre le cadastre complet : s'il lui est donc aisé de déterminer quels projets sont dedans, il lui est impossible de repérer les projets qui devraient s'y trouver et ont glissé vers des compétences wallonnes !

Blocage donc.

Pour éviter tout arrêt des subventions aux projets relevant de la Communauté française, la majorité au Parlement wallon a déposé en décembre une proposition de Décret encadrant le futur accord de coopération et maintenant les subventions jusqu'à adoption de celui-ci.

4. La liste des projets rattachés à une compétence fonctionnelle

En consultant les secteurs, la CESSoC a constaté qu'un nombre important de postes avaient fait l'objet de rattachement à une compétence inexacte, notamment entre les compétences de la Communauté française et de la Région wallonne.

Un nombre important de contestations sont en cours dont on ne sait pas bien comment elles seront résolues. Le ministre Jeholet a déjà annoncé qu'il n'entendait rien discuter avec la Communauté française alors que les interlocuteurs sociaux réclament une large concertation avec les secteurs sur ce point.

Ainsi, nombre d'emplois relevant de la compétence "Éducation permanente" semblent avoir été affectés à la compétence "emploi" relevant… du ministre de tutelle Jeholet. Ce n'est pas sans conséquence comme vous le lirez plus loin. 

La CESSoC et l'UNIPSO réclament évidemment une concertation préalable sur les compétences attachées aux projets avant tout transfert de budget.

5. Les différents nouveaux avant-projets de Décrets wallons récupérant les budgets et postes APE dans les politiques fonctionnelles 

Tous les ministres wallons ont déposé des textes d'avant-projets de Décrets à l'exception des ministres Colin et Di Antonio. Ce sera chose faite après la réunion du Gouvernement du 7-02. Ces textes en sont au stade de première lecture au Gouvernement; il faudra encore attendre l'avis du Conseil d'État, diverses concertations et au moins une nouvelle réunion du Gouvernement avant que ces textes ne soient déposés en Commission de l'Emploi du Parlement.

Plusieurs textes sont déjà connus même s'ils sont encore imparfaits ou incomplets :

• Un texte qui vise la compétence "international" touchera les ONG

• Un texte qui vise l'Action sociale et la santé (et donc les Centres régionaux d'intégration, les ILIs, les Centres de formation adaptés de l'AViQ…)

• Un texte relatif à l"Économie"

• Un texte relatif à l'"Emploi" qui nous inquiète le plus.

Plusieurs textes sont fort peu détaillés et renvoient à de larges habilitations au Gouvernement, ce qui nécessitera encore la prise d'arrêtés.

Le texte relatif à l'"Emploi" se fait plus précis puisqu'il instaure un régime de marché public (ouvert au secteur marchand) pour l'insertion de demandeurs d'emploi, utilisant pour ce faire les sommes actuellement dévolues aux APE des MIRE et des CISP en plus de tous les projets qui ont été rattachés à cette compétence sans que l'on sache bien pourquoi. Si des concertations sont en cours pour que les MIRE et les CISP conservent leurs APE, et rien n'est sûr quant à leur aboutissement, un budget d'environ 22 mios € sera repris progressivement à des dizaines d'associations dont le projet a été placé dans la compétence "emploi". Cela représente environ 800 ETPs, c'est dire l'importance du problème. On sait ce qu'on va faire de l'argent, mais on ne sait pas à qui on va le prendre puisque le cadastre des compétences liées aux projets reste sous embargo : un compte pour le ministre de la transparence.

La position de l'UNIPSO est assez radicale sur ces textes. Il apparaît indécent et inefficace de décider aujourd'hui du sort de postes qui ne se verront transférés qu'en 2021 et dans les mains de nouveaux ministres de tutelle; ceux-ci se devraient d'assumer des politiques construites dans la précipitation et sans concertation.

L'UNIPSO se dit d'accord pour opérer les transferts des postes et budgets aux tutelles après une concertation suffisante sur les répartitions de compétences. Et on s'arrête là.

La concertation sur l'intégration des postes devra s'opérer avec les nouveaux ministres après les élections et dans une durée suffisante. À cet égard, l'UNIPSO réclame un allongement de la période transitoire d'un an et, ensuite, un moratoire d'au moins une année pour mettre en place les nouveaux dispositifs.

6. La problématique particulière des postes bruxellois

Enfin, la problématique des postes bruxellois reste pendante.

D'une part, on ne connaît pas le sort des réductions de cotisations patronales, aujourd'hui assumées par la Région de Bruxelles-Capitale, pour les postes APE affectés à une unité d'établissement bruxelloise.

Enfin, le sort des ACS ex-TCT, gérés par ACTIRIS et financés par le FOREm est aussi l'objet de discussions entre les ministres de l'Emploi des deux régions.

Là encore, l'UNIPSO réclame une transition qui préserve la neutralité budgétaire.

31-08-2022 - 190 lectures